Château de Fargues

Présentation :
Propriété de 180 hectares située à l'est de la commune de Fargues et du vignoble de château Rieussec sur une petit colline dominant la commune. Le château est situé à proximité des ruines d'un ancien château détruit en 1687 par un incendie.
Le vignoble de 28 hectares dont 22 hectares sont en exploitation (80 % Sémillon, 20 % Sauvignon) est disposé sur un sol de sable sur socle argilo-calcaire situé à la proximité immédiate du château. Le vignoble entièrement drainé (comme à château d'Yquem) ne représente qu'une infime partie de la superficie de la propriété qui possède également des forêts (100 hectares), des pâturages avec un troupeau de vaches bazadaises pour le fumier des vignes, des champs de maïs (25 hectares) et des étangs.
Le domaine tire son nom de la seigneurie éponyme.

Histoire :
Le plus ancien membre de la famille de Fargues que j'ai pu retrouver est Gaillard de Fargues, né avant 1245 et décédé après 1286, seigneur d'Arbanats et de Portets dont un des fils Guillaume de Fargues épousa une demoiselle de Goth vers 1265. Cette demoiselle de Goth était la fille de Béraud de Goth (1235-1289) et d'Ida de Blanquefort (1235-?), la sœur du pape Clément V (1264-1314).
Un acte de reconnaissance de 1274 mentionne l'existence du château de Fargues.
A la fin du 13ème siècle, la seigneurie de Fargues dépendait de la seigneurie de Budos. Le seigneur de Budos est alors Raymond de Budos (1240-1280), époux de Jeanne de Goth, fille de Béraud de Goth et d'Ida de Blanquefort.
Son fils Raymond Guilhem de Budos (1270-1323), neveu du pape Clément V obtint d'Édouard Ier d'Angleterre (1239-1307), le 9 mars 1306, l'autorisation de créneler sa maison de Budos ; de l'entourer de murs, tours, fossés et enfin de la fortifier. Cet édifice fut construit à côté de deux forteresses plus anciennes (le château la Motte et un autre château situé à l'emplacement du moulin à vent de Fargues à l'ouest de la propriété).
En 1309, Raymond Guilhem de Budos obtient d'Édouard II d'Angleterre (1284-1327) haute, moyenne et basse justice de la seigneurie de Budos c'est à dire la seigneurie de Budos.
Le 10 février 1321, il achète la baronnie de Portes à Guillaume de Randon-Polignac (1289-1351).
Après le décès de Raymond Guilhem de Budos en 1323, son héritier est André de Budos (1300-1361), baron de Portes. Celui-ci cède en 1327 au baron Raymond de Fargues (?-1353), seigneur de Mauvesin et petit fils de Guillaume de Fargues, tous les péages qu'il avait le droit de percevoir sur la Garonne, à La Réole.
La seigneurie de Fargues va ensuite passer entre les mains de Bertrand de Fargues, seigneur de Malvoisin et baron de Fargues. On perd ensuite la trace de la seigneurie dépendante de la seigneurie de Budos.
Durant la guerre de cent ans, la famille de Budos, représentée par Thibaud de Budos (1335-1421), baron de Budos, marquis de Portes et Chambellan du Roi Charles VIII après 1379. se range d'abord du côté des anglais.
En 1422, André II de Budos (1380-1449), fils de Thibaud de Budos, prête allégeance au roi de France Charles VII. Il sera surnommé le « Fléau des Anglais » et deviendra gouverneur de Bazas en 1424.
Conséquence de cette « trahison », la régence du roi d’Angleterre Henri VI (1421-1471) confie la garde de la seigneurie de Budos à Pons de Castillon avant de confier celle-ci au duc de Gloucester, Humphrey de Lancastre (1391-1447), en 1433.
Après le décès en 1447 du duc de Gloucester, c'est Pierre de Montferrand (1410-1453), seigneur des maisons nobles de Lesparre et Portets qui dirige cette seigneurie.
Après la bataille de Castillon le 17 juillet 1453, la seigneurie de Budos est reprise par Gaston IV de Foix (Gaston Phoebus), mais le château de Fargues reste en la possession de la famille de Montferrand. Bérard de Montferrand (?-1471) chevalier, vicomte d'Uza, seigneur de Belin et seigneur d'Agassac prête allégeance au roi de France.
Tandis que vers 1460, Thibaud II de Budos (1440-1501?) récupère la seigneurie familiale de Buzos, Bérard de Montferrand conserve le château de Fargues.
Après le décès en 1471 de Bérard de Montferrand, Isabeau de Montferrand hérite du domaine et l'apporte en dot à son époux Pierre de Lur (1462-1515) le 24 octobre 1472.
Le domaine va alors rester désormais dans la famille de Lur avec respectivement Pierre de Lur puis Louis de Lur (1535-1573), Jean de Lur (1560-1615).
En 1566, lors des guerre huguenotes, les habitants de Fargues se réfugient au château lors de l'attaque de Langon.
En 1586, Jean de Lur épouse Charlotte Catherine de Saluces (1570- ?) héritière du marquisat de Saluces. Dans une clause du contrat de mariage, le père de Charlotte de Saluces fit inscrire ceci : « Attendu que je n'ai d'autre enfant que la demoiselle ma fille, je veux que le deuxième enfant qui viendra d'elle porte le nom et les armes de Saluces ».
Se succède ensuite à la tête de la maison noble : Honoré de Lur-Saluces (1594-1651), Claude Honoré Joseph de Lur-Saluces (?-1726) puis Eutrope-Alexandre de Lur-Saluces (1672-1754) qui est le dernier membre de la famille à naître au château de Fargues.
En 1650, lors de la fronde, les habitants se réfugient de nouveau au château de Fargues durant le siège par les troupes d'Armand, prince de Conti (1621-1668).
Dans la nuit du 24 au 25 mai 1687, le château de Fargues fut détruit par un incendie accidentel.
Le 25 février 1702, la fille unique de Pierre de Malle (?-1710), conseiller du roi, garde des sceaux de la cour des aides et finances de Guyenne, Jeanne de Malle, épouse Eutrope-Alexandre de Lur-Saluces, baron de Fargues et apporte la baronnie de Drugeac et le domaine du château de Malle à la famille Lur-Saluces.
Après Eutrope-Alexandre de Lur-Saluces, c'est Pierre de Lur-Saluces (1702-1780) qui prend le titre de baron de Drugeac et sera le seigneur de Fargues. Claude Henri Hercule Joseph de Lur-Saluces (1731-1793) lui succède et son fils Louis-Amédée de Lur-Saluces (1761-1788) épouse le 6 juin 1785, Françoise-Joséphine de Sauvage d'Yquem (1768-1851) qui va apporter le Château d'Yquem dans la corbeille de mariage.
La période de la Révolution française est pour le moins mouvementée puisque Claude Henri Hercule Joseph de Lur-Saluces sera guillotiné en 1793 et Joséphine, veuve 3 ans après son mariage (son mari est décédé après une chute de cheval), va continuer de diriger les différents domaines de la famille. Elle sera emprisonnée deux fois vers 1793-1794 par le Tribunal de la Raison, mais réussira à empêcher la saisie des différents domaines de la famille comme bien national : Fargues, de Malle, Yquem et d'autres propriétés de moindre importance. Elle devra payer la somme de 200000 livres de taxes durant la terreur pour conserver ses propriétés et sa liberté.
Quelques temps plus tard, elle permettra à son fils de rallier le camp de Napoléon ce qui lui permettra de recouvrir la fortune familiale.
Le 12 septembre 1807, son fils Antoine (1786-1823) épouse Marie Françoise Joséphine Geneviève de Filhot (1790-1815) seule héritière du domaine de Filhot et du château Coutet racheté en 1788 par son père (guillotiné en 1794).
En 1831, son petit-fils Bertrand de Lur-Saluces (1810-1867) lui succède à la tête des différents domaines familiaux. A cet époque, il n'y a toujours pas de vignoble au château de Fargues.
En 1842, Bertrand de Lur-Saluces rachète le domaine aux autres membres de sa famille.
Entre 1847 et 1857, les fossés entourant le château sont comblés et la motte de l'ancien château est aplanie.
Après le décès de Bertrand de Lur-Saluces, Amédé de Lur-Saluces (1839-1894) prend la direction du château de Fargues et décide de planter un vignoble de vin rouge dans le dernier quart du 19ème siècle. Ce vignoble bénéficiera, comme celui du château d'Yquem, d'un réseau souterrain de drains en poterie dans tout le vignoble afin d'éviter un excès d'eau dans les vignes.
Celui-ci va affronter le crise du phylloxéra qui commence dans le Sauternais à compter de 1879. A son décès, sans héritier direct, le domaine est repris par son frère cadet Eugène de Lur-Saluces (1852-1922).
Après la première guerre mondiale, Bertrand de Lur-Saluces (1888-1968) prend la direction du domaine en même temps que celle de château d'Yquem.
Bertrand de Lur-Saluces sera durant 40 ans président du syndicat viticole de la région de Sauternes et Barsac et participera activement à l'élaboration de l'AOC Sauternes.
Vers 1935, Bertrand de Lur-Saluces décide de replanter une partie des 25 hectares du vignoble en vignes blanches (5 hectares).
A compter de 1943, la propriété commence à produire un vin blanc liquoreux confidentiel avec une mise en bouteille au domaine en 1947. L'équipe du château d'Yquem s'occupant également du château de Fargues.
En 1960, la superficie du vignoble blanc sera de 10 hectares.
Après le décès de Bertrand de Lur-Saluces en 1968, c'est Alexandre de Lur-Saluces (1934-2023), son neveu, qui est désigné pour lui succéder à la tête de la propriété.
Vers 1990, le vignoble possède une superficie de 12 hectares et il existe 8 hectares du domaine en friche mais situé dans l’appellation Sauternes.
En 1993, François Amirault est nommé responsable d'exploitation du domaine.
En 2014, le vignoble couvre une superficie de 15 hectares et un programme d'extension de 9 hectares est envisagé suite à l’achat de 10 hectares suplémentaires.
Suite au décès d’Alexandre de Lur-Saluces en juillet 2023, la direction de la propriété et de son vignoble de 22 hectares en production est reprise par un de ses fils Philippe de Lur Saluces.

Les vins :
Pas de second vin.
Pas de production dans les millésimes : 1964, 1972, 1974, 1992.
Production certaines années depuis le millésime 1993 d'un vin en appellation Bordeaux issu de vignes non touchées par le Botrytis : Guilhem de Fargues (vin mi-sec, mi-liquoreux).
Densité moyenne de plantation : 7000 pieds/ha.
Récolte par tries successives.
Élevage en fût de chêne neuf : 100 %.
Rendement moyen : 9 hl/an.
Production moyenne : 190 hl/an.